d'Erik Tracy
traduit de l'anglais par Odilon Dubost
"De toute façon, une particularité de l'utilisation de la "magie" dans cette définition est qu'elle n'est pas faite de tradition ni de sorts, mais qu'elle est une force inhérente à certains, que les Hommes n'ont pas." Letters of J.R.R. Tolkien n°155 emarquons que Tolkien fait une distinction entre l'utilisation de la "magie" et celui de "sorts". De toutes les races de la Terre du Milieu, seuls les Elfes (et les Magiciens, mais ils ne sont pas une race) peuvent se servir de la magie - c'est-à-dire l'utilisation d'un pouvoir inné et inhérent de créer des états ou des objets. Cependant, il continue à expliquer qu'il y a quelques exceptions à cela (comme presque tout en Terre du Milieu), plus particulièrement dans le cas d'Aragorn, à cause de son ascendance elfique.
"La faculté de guérir d'Aragorn peut être considérée comme "magique", ou au moins comme un mélange de magie, de pharmacie et de procédés "hypnotiques". Mais c'est (en théorie) rapporté par les Hobbits, qui ont de très faibles connaissances en philosophie et en science ; de plus Aragorn n'est pas un "Homme" pur, mais un lointain descendant des "enfants de Lúthien"" Letters of J.R.R. Tolkien n°155 e mot même, "magie", est un terme utilisé par les races mortelles de la Terre du Milieu pour ces actes ou objets dont le fonctionnement ne peut être expliqué. Les elfes n'utilisent ce terme qu'au sens figuré, car cette compétence est pour eux totalement naturelle. Remarquons le commentaire que fait Galadriel à Sam en Lothlórien lorsqu'elle demande à Frodon et Sam de regarder dans son miroir.
"Et vous ? demanda-t-elle, se tournant vers Sam. Car c'est ce que vous autres appelleriez magie, je pense, bien que je ne comprenne pas ce que vous entendez par là ; et vous avez l'air d'utiliser le même mot pour les tromperies de l'Ennemi. Mais ceci, si vous le voulez, est la magie de Galadriel. N'avez-vous pas dit que vous souhaitiez voir de la magie elfique ?" Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'Anneau - Le Miroir de Galadriel aladriel est quelque peu déconcertée quant à la signification du mot, car il est dans la nature des Elfes d'avoir et d'utiliser un pouvoir inné, au but artistique et différent de la "magie" utilisée par l'Ennemi pour asseoir sa domination.
La nature de la magie est enveloppée dans la philosophie tolkienienne du pouvoir et de la domination.
"[la magie elfique] est un Art, libéré pour beaucoup de ses limites humaines, plus facile, plus rapide, plus complète (produit et vision, dans un correspondance parfaite) Et son but est l'Art, non le Pouvoir, la création, non la domination ou une réforme tyrannique de la création... L'Ennemi est toujours "naturellement" en rapport avec la pure domination, tout comme le Seigneur de la magie et des machines..." Letters of J.R.R. Tolkien n°131 ette description implique une aptitude que les races mortelles de Terre du Milieu n'ont, n'auront, et ne pourront obtenir, parce qu'elle "dépasse les limites humaines" (à ne pas lire en tant qu'étude ou technologie). Cela implique un pouvoir qui est plus facile dans les créations de choses. Facile signifie sans l'utilisation d'outils, ou d'engins extérieurs. La source est à l'intérieur des Elfes eux-mêmes, pas externe, et elle est beaucoup plus que sagesse et traditions.
La magie stimule aussi le processus entre la conception de la pensée et l'effet obtenu.
"Le mobile basique pour la magia - mis à part toutes les considérations philosophiques de comment cela pourrait-il marcher - est l'immédiateté : vitesse, baisse du travail, et aussi réduction au minimum (point de disparition) de l'intervalle entre l'idée ou le désir et son effet ou résultat." Letters of J.R.R. Tolkien n°155 a bonne magia est censée être artistique dans le but de créer ou de faire persévérer la beauté, contrairement à la mauvaise magia, qui est utilisée comme "fourberie" ou pour dominer les désirs des autres. Tolkien explique les différences de type et de motivation de la magie dans une autre de ses lettres :
"Mais je suppose que, dans l'optique du conte, d'aucuns diraient qu'il y a une distinction latente comme celle entre "magia" et "goetia". Galadriel parle des "fourberies de l'Ennemi". Bien, mais la magia peut avoir été considérée comme bonne (per se), et la goetia mauvaise. Ni l'une ni l'autre n'est dans cette histoire bonne ou mauvaise (per se) sauf dans leur mobile ou leur but. Chacun utilise les deux, mais pour des buts différents. Le motif le plus mauvais est la domination des autres "esprits libres". Les opérations de l'Ennemi ne sont en aucun cas toutes des fourberies gothiques, mais de la magie qui donne des effets réels dans le monde physique. Il utilise sa magia pour forcer choses et personnes, et sa goetia pour terrifier et subjuguer. Les Elfes et Gandalf usent (avec modération) leur magia : une magia qui produit des effets réels (comme mettre le feu à des brindilles mouillées) dans certains buts salutaires. Les effets gothiques sont entièrement artistiques et n'ont pas l'intention de tromper : ils ne trompent jamais les Elfes (mais peuvent abuser ou étonner les Hommes ignorants) car la différence pour eux est aussi claire que pour nous celle de la fiction, la peinture, la sculpture... et la vie." Letters of J.R.R. Tolkien n°155
Felagund lutte contre Sauron en chantant des mots de puissance.
"Le chant alla crescendo, Felagund se battait, et il mettait dans ses mots la magie et la poésie de tous les Elfes." Le Silmarillion - Quenta Silmarillion - Beren et Lúthien
Lúthien oblige Carcharoth, le loup qui garde les portes de Morgoth, à dormir. Ainsi elle et Beren peuvent pénétrer dans le Thangorodrim pour reprendre un Silmaril.
"Levant les mains, elle lui ordonna de dormir, en disant : "Ô esprit engendré par le malheur, tombe maintenant dans une nuit profonde et oublie pour un temps le lourd destin de la vie." Et Carcharoth s'écroula, comme frappé par la foudre." Le Silmarillion - Quenta Silmarillion - Beren et Lúthien"
Gandalf crée du feu pour réchauffer la compagnie.
"Ramassant un fagot, il le tint un moment; puis sur un ordre : naur an edraith ammen ! il plongea son bâton au milieu. Aussitôt jaillit un grand jet de flammes vertes et bleues, et le bois flamboya en pétillant." Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'Anneau - L'Anneau prend la route du sud
Gandalf invoque des mots de Commandement pendant son combat contre le Balrog dans le tombeau de Balin.
"Puis quelque chose entra dans la pièce - je le sens à travers la porte - et les Orques eux-mêmes furent effrayés et devinrent silencieux. Le nouvel arrivant s'empara de l'anneau de fer, et alors il perçut une présence ainsi que le sort que j'avais jeté sur la porte. Ce qu'il était, je ne pus le deviner, mais jamais je n'avais senti pareil défi. Le contre-sort était terrible. Il faillit me briser. Un instant, la porte échappa à mon emprise et commença à s'ouvrir ! Il me fallut prononcer un mot de Commandement. L'effort se révéla trop grand." Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'Anneau - Le pont de Khazad-dûm
Aragorn soigne Faramir, Éowyn et Merry, en prononçant leur nom et les appelant à l'aide des vertus guérissantes de l'Athelas.
"Aragorn posa sa main sur la tête de Merry, et, la passant doucement parmi les boucles brunes, il toucha les paupières, l'appelant par son nom. Et quand la fragrance de l'Athelas se répandit dans la pièce telle la senteur des vergers et de la bruyère à la lumière du soleil plein d'abeilles, Merry se réveillé soudain et dit : "J'ai faim. Quelle heure est-il ?"" Le Seigneur des Anneaux - Le retour du Roi - Les maisons de Guérison
L'erreur de Gimli, demandant à Legolas de faire attention à Gandalf dans la forêt de Fangorn.
"Ton arc, Legolas ! Bande-le ! Prépare-toi ! C'est Saroumane. Ne le laisse pas parler ou nous jeter un sort ! Tire avant." Le Seigneur des Anneaux - Les Deux Tours - Le cavalier blanc
ais l'usage de la magie de cette manière à un prix : elle fatigue temporairement l'utilisateur, comme cela requiert une dépense d'énergie interne à l'individu. Gandalf dit qu'il a besoin de se reposer après son combat contre le Balrog dans la Moria : "Je suis épuisé. Je dois me reposer ici, même si tous les Orques jamais engendrés sont après nous." (Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'Anneau - Le pont de Khazad-dûm).
l y a cependant plusieurs exceptions - caractéristiques de Tolkien - où la magie est invoquée sans l'utilisation de mots, mais dans ces cas, il y a toujours utilisation d'objets. L'exemple de cette sorte le plus convaincant est quand Sam utilise la fiole de Galadriel, qui contient la lumière d'Eärendil reflétée dans le miroir de Galadriel (l'étoile Eärendil étant elle même la lumière d'un Silmaril brillant du plus haut des cieux) : "Comme si son esprit invincible avait mis son pouvoir en mouvement, la verre s'enflamma soudainement comme une torche blanche dans sa main. Il s'enflamma comme une étoile qui glisse du firmament." (Le Seigneur des Anneaux - Les Deux Tours - Les choix de Maître Samsagace). La fiole elle-même contient la puissance de la lumière, et le désir de Sam d'utiliser cette lumière, sans aucun mot, est ce qui fit qu'elle s'alluma pour éblouir Arachne.
Cependant, tous ces objets furent fabriqués par l'intermédiaire des traditions, qui sont différentes, selon Tolkien, de l'usage de la "magie".
"La branche particulière des Hauts-Elfes, les Noldor, ou Maîtres des Traditions, est toujours du côté de "la science et de la technologie", comme nous devrions l'appeler : ils veulent avoir le savoir que Sauron a vraiment eu [ ... ] Le désir "particulier" des Elfes d'Eregion - une allégorie de l'amour des machines et des dispositifs techniques, si vous voulez - est aussi symbolisé par leur amitié avec les Nains de la Moria." Letters of J.R.R. Tolkien n°153 Prenons un éclair, par exemple. Pour une civilisation moins avancée, un éclair peut très bien sembler une source magique de lumière. Pour nous, son origine et utilisation est conforme aux lois de la Nature. Il en fut de même pour les mortels de Terre du Milieu qui étaient témoins de la "technologie" des elfes. Sam le pensait aussi quand il demandait à voir la magie des Elfes.
es traditions sont les moyens par lesquels les objets sont crées avec des capacités spéciales. Certains (mais pas tous) exemples d'objets créés grâce aux traditions sont :d'origine elfique :
- les Trois Anneaux des Elfes : Vilya, Nenya et Narya,
- les Palantíri : les pierres de vision de Númenor,
- les Lampes des Elfes : lampes brillantes sans apport d'énergie,
- le Miroir de Galadriel : un oracle d'évènements futurs,
- la Fiole de Galadriel : une source de lumière,
- le Fourreau d'Andúril : runes de protections contre le bris,
- l'Elessar : propriétés guérissantes ;
d'origine naine :
- le Heaume de Hador : runes de protection pour le porteur, et de peur pour les ennemis,
- les Runes de Puissance dans la Salle du Trône de la Moria,
- les Portes de la Moria, qui s'ouvrent uniquement avec les mots appropriés ;
d'origine numénoréenne :
- les Lames des Hauts des Galgals : faites avec des sorts de ruine pour le Roi-Sorcier ;
d'origine mauvaise :
- l'Anneau Unique,
- Grond : le bélier avec des runes de ruine et de destruction,
- les Lames de Morgul : maudites pour que la victime devienne un spectre
"De la main gauche, il élevait son bâton brillotant, dont la lueur ne révélait le juste que juste devant ses pieds; de la droite il tenait son épée Glamdring." Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'Anneau - Un voyage dans l'obscurité
"Il leva son bâton et la hache de Gimli sauta de son poing et tomba en sonnant sur le sol. L'épée d'Aragorn, dnas sa main raidie et immobile, flamboya d'un feu soudain. Legolas poussa un grand cri et tira une flèche haut dans l'air : elle disparut dans un éclat de flammes." Le Seigneur des Anneaux - Les Deux Tours - Le Cavalier Blanc
"Il leva son bâton, il y eut un roulement de tonnerre. Le soleil fut effacé aux fenêtres de l'est ; toute la salle devint noire comme la nuit. Le feu s'évanouit en cendres. Seule resta visible la silhouette de Gandalf, haute et blanche devant l'âtre noirci. Ils entendirent dans l'obscurité le sifflement de la voix de Langue de Serpent: "Ne vous avais-je pas conseillé, Seigneur, d'interdire son bâton ? Cet idiot d'Hama nous a trahis !" Il y eut un éclair, comme si la foudre avait fendu la voûte. Puis tout fut silencieux. Langue de Serpent tomba, face contre terre." Le Seigneur des Anneaux - Les Deux Tours - Le Roi du Château d'Or
Considérons aussi la traduction de Tolkien du nom "Gandalf"...
"Gandalf est un transposition en anglais, du même ordre que celles opérées pour les noms des Hobbits ou des Nains. Le nom existe réellement en Vieux Norrois ( c'est celui d'un Nain dans le Voluspá ) et je l'ai utilisé car il m'a paru contenir le radical GANDR-, un bâton, et singulièrement, un bâton du type de ceux qui ont un usage "magique", d'où Gandalf que l'on pourrait traduire : "Créature elfique au bâton (magique)"" Contes et légendes Inachevées - Troisième Age - Des Istari l apparaissait alors que les bâtons des Istari sont nécessaires pour leur capacité à utiliser la magie. Ce n'est pas que les bâtons soient magiques en eux mêmes, mais un engin par lequel leur magie se manifesterait. Comme dit plus haut, les Elfes et les Maiar (Gandalf en était un) possédaient le pouvoir inhérent requis pour la magie. Mais dans le cas des Istari, un bâton sert à la fois comme symbole d'appartenance à leur ordre, et comme un intermédiaire. Il en effet ainsi comme cela est démontré par Gandalf lorsqu'il brise le bâton de Saroumane, et le chasse de l'ordre des Istari, ce qui déchoit Saroumane de tous ses pouvoirs. Ceci est confirmé par Frodon lors de la dernière rencontre avec Saroumane.
Saroumane se redressa de toute sa hauteur et leur jeta un regard menaçant de ses yeux noirs. "Mais ne vous imaginez pas qu'en perdant mes biens, j'ai perdu tout mon pouvoir" [...] Les Hobbits reculèrent. Mais Frodon dit : "Ne le croyez pas ! Il a perdu tout pouvoir, sauf sa voix qui peut encore vous intimider et vous tromper, si vous le laissez faire."" Le Seigneur des Anneaux - Le Retour du Roi - Le nettoyage de la Comté
lorsque Frodon fuit devant le Nazgúl au gué de la Bruinen :
"Alors le chef, qui était déjà au milieu du gué, se dressa menaçant sur ses étriers et leva la main. Frodon fut frappé de mutisme. Il sentit sa langue se coller à son palais et son cur battre à tout rompre. Son épée se brisa et tomba de sa main tremblante." Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'Anneau - Fuite vers le gué ;
au siège du Gondor :
"Le Capitaine Noir se dressa alors sur ses étriers et cria d'un voix terrible, prononçant en quelque langue oubliée des mots de puissance et de terreur de nature à briser les curs et les pierres. Par trois fois il cria. Par trois fois le grand bélier retentit. Et soudain, au dernier coup, la porte de Gondor se rompit. Comme frappée par quelque maléfique soufflant, elle éclata : il y eut un éclair aveuglant, et les battants tombèrent et fragments sur le sol." Le Seigneur des Anneaux - Le Retour du Roi - Le siège du Gondor.
ependant, la source de cette magie vient de Sauron lui-même. Il était dans la nature des Nazgûl d'avoir cette capacité comme définie par Sauron, et comme résultat de leur servitude à lui par l'utilisation prolongée de leurs Anneaux. La capacité des Nazgûl à utiliser la magie a été "achetée" à un prix terrible : être les esclaves invisibles Sauron.
Prenons les exemples suivants :
"Il était un Roi sur son trône, dans une demeures de pierre avec beaucoup de piliers, avec un parquet d'argent et un toit d'or et des runes de puissances sur la porte." Le Seigneur des Anneaux - La communauté de l'Anneau - Un voyage dans l'obscurité ;
"Le Heaume de Hador fut remis entre les mains de Thingol. Ce heaume était d'acier gris tout ouvragé d'or, et s'y trouvaient gravées de la victoire. Un pouvoir l'habitait , qui protégeait quiconque le portait des blessures et de la mort." Contes et légendes Inachevés - Premier Age - Narn I Hin Húrin. a nature de ces runes n'est jamais expliquée par Tolkien, mais nous pouvons déduire quelque chose sur ces runes à partir des contextes historiques dont Tolkien s'est servi pour construire sa Terre du Milieu. Nous savons que Tolkien a été influencé par les littératures et cultures germaniques, anglo-saxonnes, et nordiques. L'utilisation des runes pour ces cultures était aussi dans des buts "magiques" sur des épées, des fourreaux, ou d'autres objets. Les runes avaient alors des noms et étaient censées représenter certains concepts fondamentaux tels que la victoire ou la protection. Si quelqu'un connaissait une rune pour une propriété donné, un autre pouvait la graver sur un objet pour conférer la propriété à l'objet en question.